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Barbizon…”La vache à lait de Chailly”

Aux environs de 1848, Millet et le mélancolique Rousseau s’installent à Barbizon, c’était un hameau perdu au milieu de landes et de bois habités par de pauvres bûcherons et de laboureurs de « champs maigres ». Barbizon était alors un hameau de Chailly-en-Bière.

En moins d’un demi-siècle, le développement de Barbizon fut impressionnant.

A l’aube de 20e siècle, le chemin de fer du PLM amenait les touristes jusqu’à Melun et bientôt le tramway les conduirait de Melun à Barbizon via Chailly-en-Bière. Chailly, voué à l’agriculture, fonctionnait au gré des saisons, de récoltes en récoltes.

Au conseil municipal, les 8 conseillers chaillotins disposaient d’une confortable majorité. Un vent de révolte grondait dans le hameau. Petit à petit ses capacités d’accueil augmentaient, on comptait bientôt 5 hôtels, des villas, locations et meublés voyaient le jour. Les peintres, hommes de lettres et excursionnistes affluaient.

En 1896, la commune de Chailly compte 1162 habitants dont 391 à Barbizon. La population du hameau gronde : le cantonnier communal est presque inconnu à Barbizon, l’église, la mairie, le cimetière sont à 3 kilomètres.

Tous les commerces sont installés à Chailly, de la couturière modiste au docteur, en passant par le boucher, le boulanger, les entreprises de maçonnerie, les peintres (en bâtiment), les menuisiers, les manœuvres et femmes de journées viennent tous de Chailly. Tant de bénéfices commerciaux joints aux apports d’impôts sont insupportables !

Des propos autonomistes circulent, la création d’une commission syndicale est envisagée. Le 24 juin 1900, le Maire de Chailly tempête et s’élève vigoureusement contre le projet et met en demeure Barbizon de citer des faits illustrant leurs revendications et griefs.

Le 5 août 1900 la section de Barbizon de la commune de Chailly-en-Bière est appelée à élire les cinq membres de la commission syndicale. Tous de Barbizon chargés de réfléchir à « l’érection de Barbizon en commune séparée ». La section de Barbizon comptait 128 électeurs inscrits, le nombre de votes exprimés en faveur du projet fut de 88, tous valables. La majorité absolue requise est de 45. Le rituel de l’élection était alors en tous points semblable à ce que nous pratiquons de nos jours.

La moyenne d’âge des membres du syndicat est de 43 ans. Des cinq membres de la commission, trois sont cultivateurs : Meneux, Lamiraut et Caron. Les deux autres, Delorme et Comble sont tous deux propriétaires. M. Comble étant en outre artiste peintre et sera élu Président de la commission syndicale. Il jouera un rôle décisif dans l’adoption du projet. Le projet est accablant pour Chailly et la réplique malaisée.

Le 19 juillet, les huit conseillers municipaux de Chailly boycottent la séance où l’on doit discuter du projet.

Le Préfet tance sévèrement les élus de Chailly.

Le 20 novembre 1903, une loi insérée au Journal Officiel le 26 novembre consacre la division. La dissolution du conseil municipal de Chailly est prononcée, la mise en place d’une délégation chargée d’expédier les affaires courantes présidées par M. Rémy Moreau (l’ancien maire) assisté de Messieurs Grégoire et Lambelin, est mise en place.

Viennent ensuite les discussions interminables sur la répartition du budget de 1904.

Il ne fait aucun doute que le Président de la commission syndicale, propriétaire et artiste peintre, avait «le bras long » mais il faut bien reconnaître que cette séparation était inéluctable.

Bien entendu, je vous fais grâce des chicaneries, des insultes, noms d’oiseaux, entorses à la vérité qui émaillèrent le processus « d’érection » de Barbizon au statut de commune séparée.
(1) Extrait du projet de la commission syndicale
L.F.B.B.M. n° 54 – juin 2001